Étude sur la sexualité des jeunes évangéliques en France
Une récente étude auprès les jeunes évangéliques en France s'intéressait à l'éducation à la sexualité et la sexualité de ces jeunes. Une équipe autour d'André LETZEL, sexologue, conseiller conjugal, psychanalyste et président de l'association AOC ainsi que co-auteur du matériel ENSEMBLE (préparation au mariage) et Brice GOUVERNET, chercheur-enseignant à l'université de Rouen et docteur en psychologie, travaille toujours autour de ce projet de recherche. Plus de 2800 participants ont permis d'établir un état des lieux sincère autour du sujet de l'éducation sexuelle et de la sexualité en générale auprès des 18-30ans dans nos communautés, même si un grand nombre de participants n'a pas répondu à l'ensemble des questions posées. L'objectif de cette étude n'était pas une comparaison avec d'autres populations, mais d'établir un état des lieux.
La quantité des données récoltées est énorme et nécessite encore plusieurs mois de travail pour extraire les informations fiables. Toutefois nous pouvons déjà vous fournir, en avant-première, les premières tendances qui se profilent pour certains sujets.
La sexualité en couple - source de plaisir
La majorité des personnes en couple, soit 85%, trouvent du plaisir dans leurs rapports sexuels. Cependant, il existe une petite différence entre les sexes. Environ 81% des femmes déclarent que leurs rapports sexuels sont souvent une source de plaisir, tandis que chez les hommes (dont le nombre dans l'étude est inférieur à celui des femmes), ce chiffre est plus élevé, atteignant 91%.
L'éducation à la sexualité dans nos communautés
La question de l'éducation sexuelle était au cœur de cette étude. 57% des 764 personnes qui ont répondu aux questions sur l'éducation à la sexualité dans les églises, déclarent ne pas avoir bénéficié d'interventions sur la sexualité dans leur église et 6% ne se souvenait plus. Les 37% ayant pu bénéficier d'interventions sur la sexualité sont pour 41% satisfaits alors que presque autant déclarent être insatisfaits concernant la fréquence de ces interventions. 57% de ceux qui ont pu bénéficier des interventions sur la sexualité disent être satisfait des compétences des intervenants.
Mais ces chiffres sont à mettre en relief avec une autres question concernant le contenu et les besoins en termes d'éducation à la sexualité. Les auteurs de l'étude ont posé la question : Quels sujets devraient être davantage être abordés dans le cadre de l'éducation sexuelle dans la communauté ?
Besoins en termes d'intervention
90% des femmes disent que l'on devrait davantage aborder le sujet de la prévention des violences sexuelles contre 74,5% des hommes. Le plaisir sexuel est un sujet dont 81,8% aimeraient davantage entendre parler et 78,8% souhaiteraient davantage entendre sur la question : Comment se passe un rapport sexuel concrètement. Ce chiffre est particulièrement intéressant puisqu'il fait écho à une étude récente qui évoquait le lien entre l'absence de réponses aux question des jeunes sur la sexualité et l'intérêt croissant de la pornographie. Ce qui voudrait dire que moins les jeunes trouvent des réponses à leurs questions, parfois très précises sur la sexualité, plus ils seraient attirés par trouver leurs réponses dans des contenus pornographiques.
Plus de 77% des femmes expriment le besoin que l'on évoque davantage la question de genre ou encore 78% souhaitent entendre parler des orientations sexuelles. Alors que sur les mêmes sujets les 65,8% hommes voudraient que l'on parle davantage des orientations et 61,5% des questions liés aux identités de genre.
Les sujets qui semblent avoir été suffisamment abordés sont : le respect 36% et les aspects théologiques et moraux 34%.
Les violences sexuelles
Ce sujet reste un sujet particulièrement sensible dans nos églises. 710 personnes ont répondu aux questions sur les violences sexuelles. 14,9% des femmes dans nos églises indiquent avoir déjà vécu un viol, datant de plus de 12 mois et 1,7% des hommes. Si nous croisons ces chiffres avec le paragraphe sur l'éducation sexuelle nous pourrions comprendre pourquoi plus de 90% des femmes souhaiteraient que dans nos communautés soit davantage abordé le sujet de la prévention des violences sexuelles. Autrement dit, on n'en parle pas assez.
La sexualité en générale
61% éprouvent un sentiment de culpabilité quant à leurs pensées et sentiments sexuels. Dans le chapitre sur les émotions et la sexualité d'autres informations intéressantes apparaissent. 42% des répondants (N=697) disent que certaines choses qu'ils font dans des situations sexuelles sont moralement mauvaises. Ces résultats peuvent être mis en relation avec ce sentiment de culpabilité, évoqué ci-dessus.
Un dernier aspect nous semble encore pertinent. L'étude questionnait également ce qu’en sexologie est appelé l'estime de soi sexuelle. A l'item : "En général, je sens que mes expériences sexuelles m'ont donné une image plus positive de moi-même." 53% ont répondu par la négative. Ce qui voudrait dire que pour à peine une moitié des personnes interrogées la sexualité est source d'une bonne estime de soi en termes de sexualité.
Comme évoqué dans l'introduction, ces chiffres donnent une tendance. Le nombre des participants est suffisamment élevé pour être représentatif. Toutefois, nous parlerons uniquement des tendances pour l'instant puisque les analyses détaillées avec les différents tests de fiabilité ainsi que l'analyse des biais prendra encore du temps.
Conclusion
Malgré les résultats encore provisoires, les chiffres qui se profilent sont éloquents et permettent déjà la rédaction de plusieurs propositions.
1) Le sujet de la sexualité humaine est insuffisamment abordé dans les différentes églises locales. Il semble que beaucoup de jeunes expriment un besoin très net de trouver des réponses à leurs questions concernant les différents aspects de la sexualité.
2) Dans nos églises nous avons une femme sur 7 qui a été victime de viol alors que le sujet n'est pas abordé. Comment tenir compte de cet état de fait ? Comment prévenir les violences sexuelles au sein des couples, et pour les jeunes femmes dans nos communautés ? Quelle éducation sexuelle mettre en place pour les garçons et les filles ?
3) La question de l'épanouissement sexuel est liée à une bonne estime de soi (sexuelle). Pour parvenir à cette estime de soi positif, il semble que le discours existant aurait besoin de s'entourer des compétences biologiques, psychologiques, sociales et sexologues pour garantir sa pertinence.